lundi 14 septembre 2009

Le Regard de Ramosé


Prés de Thèbes dans le ventre de la colline de Gournah, La tombe du vizir Ramosé "celui en qui Ra redonne vie".
Dans ce lieu hors du temps et pourtant tellement vivant, des hommes et des femmes vous scrutent l’œil ouvert vivant, animant le calcaire blanc des murs, ils vous suivent du regard semblant dire :
"-Qu’êtes vous venus chercher ici, à travers ces fragments de pierre sublimes et pathétiques ?
-Que voyez-vous dans le corps de cette terre de Kemet éparpillé, tel celui d’Osiris
?"
Et mon cœur leur répond:" je suis ici pour rassembler mes morceaux, je suis ici car je suis d’ici, en ce lieu je suis née et je suis morte. Je suis venue vous saluer en noble voyageur, en moi vous êtes vivants en vous je revis."
Un couple, celui, de Ramosé que son épouse Meryptha tient tendrement, délicatement par l’épaule, comme pour éprouver sa chaleur vivante, semblant dire ne meurt pas.
Leurs yeux cernés de Khôl ouverts sur demain scrutent toujours l’horizon, tentant d’apercevoir Khepri le petit soleil du devenir Osirien. Car ici sur la blancheur des murs se détache le noir du regard, sous l’onde vibrante des perruques de pierre accentuant la noblesse et la beauté des visages. Ramosé et son Épouse, "l’aimée de Ptah", l’œil ouvert, dignes et raffinés, disent :"regarde et ne meurt pas".
L’absence de couleur dans cette partie de leur palais tombeau met en valeur la pureté de la sculpture.
Alors que nous sommes rivés les yeux au sol, les leurs sont tournés vers les étoiles, ils ne nous demandent pas de voir mais de sentir. Ici le temps ne s’est pas arrêté, il tourne autour de nous entre les colonnes papyriformes, tout est là vivant, même si cela a été mutilé par les profanateurs qui passent ici depuis des millénaires.

Cette perception demande du temps mais rien ici ne peut se faire dans la précipitation. Je cherche le cœur de ces images vivantes, le centre de ces êtres sublimes, mais leur cœur est mobile, il navigue en fonction du mien et de ses facultés d’imprégnation. Tant que le plein de mon être empli l’espace rien ne se passe. Pour renter ici et "y être" il faut faire le vide, si je veux que mes cellules soient nourries.
Je repars en remerciant le Maître des lieux d’avoir ouvert mon regard sur l’oiseau qui vole en moi, prisonnier de mes lourdeurs.

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Bibliotheque d'Alari

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